Il y a des week-ends qui se vivent comme des voyages intérieurs. Pas besoin de partir à l’autre bout du monde pour ressentir le dépaysement, l’émerveillement, le silence. Ce week-end-là, je suis partit rendre visite à mes parents et j’en ai profité pour prendre la direction de deux lieux emblématiques de la Provence : le Mont Ventoux et le Sentier des Ocres de Roussillon. Deux paysages aussi opposés que complémentaires : l’un aride, blanc, soufflé par le vent ; l’autre chaud, rouge, profondément sculpté par la terre.
Mont Ventoux : solitude sur le toit de la Provence
J’ai commencé par le Mont Ventoux. Dès la montée en voiture depuis Bédoin, on sent qu’on s’élève vers autre chose. Le paysage change, les pins cèdent leur place aux pierres claires, l’air devient plus frais. Mon point de départ : le Chalet Reynard, à environ 1 400 mètres d’altitude.
De là, j’ai emprunté le sentier menant au sommet. Le sol crisse sous les pas, les rares arbres s’effacent pour laisser place à un univers minéral, presque lunaire. Tout devient blanc : les cailloux, la lumière, l’atmosphère. Le vent se lève. Froid, puissant, libre.
Chaque pas vers le sommet est une pause en soi. Les paysages s’ouvrent à chaque détour. À droite, les Dentelles de Montmirail se découpent en dentelle sur l’horizon. Plus loin, les Alpilles, le Luberon, et même la mer, si le ciel est assez clair. Là-haut, la vue porte loin. Mais ce n’est pas la vue qui frappe le plus, c’est le silence, à peine troublé par le souffle du vent.
Le Ventoux, ce n’est pas qu’un sommet. C’est un instant suspendu, un lieu où l’on se retrouve, où l’on respire autrement. Et une fois redescendu, on se rend compte qu’on y a laissé quelque chose… peut-être un peu de soi.









Conseils pratiques — Mont Ventoux
- 📍 Accès : Chalet Reynard, accessible depuis Bédoin ou Sault
- 🥾 Sentier : randonnée facile, environ 1h30 aller-retour
- 🎒 Équipement : coupe-vent impératif (même en été), eau, crème solaire, bonnes chaussures
- 🕐 Période idéale : mai à octobre. Hors saison, la route peut être fermée (neige, verglas)
- 🚲 Attention cyclistes : l’ascension est mythique à vélo, respectez leur espace sur la route











Roussillon et le Sentier des Ocres : marcher dans une palette de peintre
Le lendemain, changement total d’ambiance. Cap sur Roussillon, petit bijou perché du Vaucluse, au cœur du Parc Naturel Régional du Luberon. C’est là que se trouve le Sentier des Ocres.
Dès les premières marches, on est happé par les couleurs. Le sol n’est plus blanc, mais rouge feu, jaune éclatant, orange profond. Tout semble peint à la main. Les falaises se dressent comme des vagues figées, les pins tranchent avec leur vert franc, et la lumière du matin donne une chaleur presque surnaturelle au décor.
Le sentier est parfaitement aménagé. Deux boucles au choix : j’ai opté pour la plus longue, qui se parcourt en moins d’une heure. On déambule dans un véritable labyrinthe naturel, entre parois sculptées, escaliers, passages ombragés… et toujours ces pigments ocres qui accrochent la lumière comme nulle part ailleurs.
Impossible de ne pas s’arrêter toutes les deux minutes. Pour admirer. Pour photographier. Pour s’imprégner.
Conseils pratiques — Sentier des Ocres
- 🏠 Lieu : Roussillon, à 1h du Mont Ventoux
- 💵 Tarif : 6 € par adulte (gratuit pour les enfants)
- ⏰ Horaires : tous les jours d’avril à novembre, horaires variables selon la saison
- 👟 Équipement : chaussures fermées recommandées (l’ocre tache), chapeau, eau
- 📸 Astuces photo : lumière idéale le matin ou en fin de journée pour sublimer les couleurs
L’histoire derrière les paysages
Le Mont Ventoux est une montagne qui a marqué l’histoire. En 1336, le poète italien Pétrarque entreprend son ascension — non pas par nécessité, mais par curiosité. Il veut « voir ce que l’on voit du sommet ». Ce geste, inédit pour l’époque, est considéré par certains comme l’acte fondateur de l’alpinisme moderne.
Bien plus tard, le Ventoux entre dans la légende du Tour de France. L’ascension depuis Bédoin est l’une des plus redoutées du circuit. En 1967, le coureur britannique Tom Simpson y trouve tragiquement la mort. Une stèle commémorative est encore visible au bord de la route, quelques kilomètres avant le sommet.
Quant au Sentier des Ocres, il doit son existence à l’industrie du pigment. Dès le XVIIIe siècle, on exploite ici une terre naturellement colorée, utilisée pour les peintures, les enduits, les étoffes. Les carrières, aujourd’hui désaffectées, ont été préservées et valorisées. C’est ce patrimoine géologique, artistique et humain qu’on parcourt aujourd’hui avec autant de plaisir.
En conclusion
Pendant ces deux jours, j’ai traversé deux mondes :
- celui du Ventoux, rude, lumineux, silencieux, presque mystique.
- celui de Roussillon, chaud, coloré, tactile, presque vivant.
C’est ça, la richesse de la Provence. Une terre de contrastes, de lumière, de mémoire. Je suis rentré le cœur léger, pleins d’émotions, les chaussures sales et le regard plus ouvert.
Et comme souvent après un beau week-end… j’ai déjà envie d’y retourner (surtout depuis que je sais que je suis passé à côté de ce qui s’appelle “le colorado provençal”)